Géopolitique, colonialité et libération

Intervention de Mireille Fanon Mendès France au séminaire virtuel Géopolitique, colonialité et libération, le 17/09/2020

Je vous remercie de m’avoir conviée à ce séminaire Géopolitique, colonialité et libération. J’interviens au nom de la Fondation Frantz Fanon.

Nous vivons aujourd’hui dans un monde où l’ordre international a été façonné par 500 ans d’hégémonie blanche occidentale. Cette hégémonie économique, politique et civilisationnelle s’est formée sur le génocide, la conquête, la traite négrière transatlantique et la mise en esclavage. 

Elle s’est maintenue jusqu’à nos jours à travers le colonialisme et l’impérialisme s’exprimant aussi bien contre les peuples que contre les populations du nord au sud. Le processus violent de subjugation des populations non européennes va s’accompagner du développement d’un ensemble de discours justificateurs qui vont naturaliser la domination  par la racialisation.     

La race blanche et sa suprématie vont s’inventer au fil de la constitution de cet ordre international mis en place par l’Europe puis par l’Occident dans lequel nous vivons encore. L’invention des races considérées comme inférieures, civilisables et colonisables se développe dans ce même mouvement, car le système monde eurocentré, qui va enfanter l’ordre capitaliste globalisé contemporain, s’appuie sur une véritable division raciale du travail à l’échelle globale. 

Dès 1492, lors d’arrivée de marins et de soldats dans des terres jusqu’alors inconnues, les peuples s’élevant contre le pillage de leurs ressources naturelles furent massacrés. Vaincus par les armes et les pacotilles qui leur étaient proposées, ils ont laissé -et n’ont eu parfois d’autre choix- s’installer des comptoirs avec l’appui de banques parmi lesquelles on peut citer la JP Morgan Chase, le Crédit suisse et la Banque de France…

Les fondations de la mondialisation étaient posées, la libre circulation des biens était portée sur les fonds baptismaux du capitalisme, celle des personnes étant régulée par la suprématie blanche : les Africains arrachés à leur tribu au fond des cales –statut qui leur est encore réservé lorsqu’ils veulent migrer pour raisons de guerre ou économico-environnementales- et les Européens-colons sur le pont ; ils pouvaient aller où ils voulaient et cette possibilité leur est toujours offerte… 

Les ressources naturelles suscitaient intérêt et envie car elles enrichissaient ceux qui les rapportaient et elles continuent à être l’enjeu de rapports de force, ce qui maintient la plus part des peuples africains, avec l’aval de leur président, dans une soumission aux forces impérialistes qui ont besoin des ressources naturelles africaines. Pas question qu’elles leur échappent, tout comme il n’était pas question que leur échappe une main d’œuvre gratuite sur laquelle ils avaient droit de vie et de mort.

Les colon-meurtriers ont mis en place, dès le XV siècle, siècle que l’on doit identifier comme celui d’une grande catastrophe, plus précisément métaphysique et démographique (Maldonado Torres, Ten thesis on decoloniality, 2016),  la mise en esclavage autorisant ainsi à n’utiliser des êtres humains que pour leur force de travail désincarnée afin que la différence entre force de travail et travail soit annihilée de façon à ce que la plus-value génère le maximum de profit pour les colons.  Le système capitaliste plantait ainsi ses premières graines prédatrices. 

L’avancement de la conquête et du colonialisme modernes impliquait non seulement la création d’une division géopolitique basée sur la catastrophe métaphysique, mais aussi l’imposition d’idées, d’organisation et de structures sociales. 

Dans ce contexte, la pluralité des conceptions de la communauté et de la différence humaine est anéantie, même si dans de nombreux cas, le succès n’est que partiel. Malgré cela, une communauté mondiale avec des priorités, des perceptions et des désirs similaires a émergé, ce que Sylvia Wynter identifie comme l’ethnoclass Man (Wynter 2003). 

Si l’ethno class man a régné sur les corps à partir du 15 siècle, pour assurer sa puissance économique, il n’a jamais cessé de le faire. 

Il n’est qu’à regarder le nombre important de jeunes noirs ou arabes incarcérés pour comprendre que ces chiffres exponentiels démontrent que c’est le prix que les corps ‘indigènes’ paient pour assurer aux ethno class Men la sécurité, le bien être mais surtout leur liberté. 

Après avoir garanti l’enrichissement du blanc –période de la mise en esclavage- et la domination de la suprématie blanche dans les domaines culturel, économique, politique, juridique –particulièrement en ce qui concerne les droits humains-, il faut maintenant lui assurer sa sécurité et sa libre circulation ce qui se traduit par l’emprisonnement des corps noirs. Le paradigme de la domination n’a pas changé d’un iota. Il est colonial, profondément violent, raciste, racialisant, déshumanisant et inhumain.

Le capitalisme a toujours assuré à ceux qui possèdent les fonctions de domination (Robert Kurz) qu’ils pouvaient exercer leur contrôle sur les esprits et les corps sans avoir à répondre de leurs crimes, et particulièrement  en ce qui concerne le traitement qu’ils ont fait subir aux corps noirs et indigènes. Portant ainsi sur les fonts baptismaux le racisme structurel dont l’une des expressions coloniales est la colonialité des Êtres sur  les Non Êtres.

Ainsi les modèles politiques et culturels européens racistes vont envahir le reste du monde, les pays du Sud global vont être institués en réservoirs de matières premières et des Non Êtres traités comme des marchandises, plus précisément comme « un bien meuble[1] », ainsi que cela a été stipulé dans le Code noir.  

Lorsque l’on parle de mise en esclavage, on  parle de déshumanisation, de déni du droit à la vie, de la perte d’identité au nom d’une supériorité supposée des Blancs. On parle d’un corps qui n’appartient plus à celui qui l’habite et le vit. 

Même après les abolitions, cette relation à l’autre n’a jamais cessé d’être traversée par l’indignité portée par les tenants de l’idéologie basée sur le racisme structurel. 

Cessons d’être naïfs et comprenons que le système capitaliste dans lequel nous vivons est né de la division de l’humanité imposée par l’idéologie de la race comme marqueur social. En Libye, lorsque des migrants[2] sont vendus comme l’étaient nos ancêtres, cela émeut un temps mais personne ne veille à ce que cela ne se reproduise pas. Quelques déclarations, et toujours les institutions internationales et la communauté internationale silencieuses… Lorsque des Afro-colombiens, défenseurs des droits, sont tués–plus de 200 depuis le début 2020- , le gouvernement colombien ne prend aucune mesure contre ces actes de génocide, alors que les accords de paix sont signés depuis 2016. 

A croire que ceux qui pensent le capitalisme ne voient toujours pas le lien pervers et mortifère qu’il y a entre noir et mis en esclavage, entre noir et race, entre noir et classe, entre race et classe.  

De ce point de vue, les inégalités raciales sociales contemporaines qu’on retrouve dans toutes les sociétés du monde sont inextricablement liées à un ordre géopolitique international. La condition noire est immédiatement liée à la position de l’Afrique dans l’ordre des échanges internationaux, tout comme la condition musulmane en Occident est directement déterminée par le rapport que l’impéralisme occidental entretient avec les pays du monde musulman. L’ici, c’est le là bas. On bombarde là bas, on discrimine ici. On tue ici et là bas. 

La race et la domination raciale sont par nature géopolitiques, et la lutte contre le racisme racialisant est un combat qui, loin de se résumer à des postures morales, est politique afin de parvenir à un changement de l’ordre international, responsable du système d’exploitation et de déshumanisation.

Les rapport sociaux structurés par la race sont ainsi le reflet des rapports internationaux, et leur changement dépend d’un changement dans ces rapports internationaux. Racisme racialisant et impérialisme sont intimement liés. L’impérialisme occidental constitue l’une des faces les plus évidentes des modes de défense de la suprématie blanche et de l’ordre économique et géopolitique qui le sous-tend. Chaque puissance qui vient contester cette suprématie s’expose à une réponse violente, et à un assaut culturel, politique, économique, militaire et même environnemental. 

Chaque processus politique visant à un changement structurel de cette situation de domination se voit férocement combattu, à l’instar des luttes anticoloniales passées et présentes, et des revendications pour de réelles Réparations pour le crime contre l’humanité qu’a constitué la mise en esclavage du peuple Noir. »

Force est de constater qu’à l’heure actuelle, aucune institution multilatérale ne porte la question des réparations pour les crimes contre l’humanité et de génocide commis lors de la traite transatlantique négrière, de la mise en esclavage, de la colonisation et du colonialisme. Les Etats savent très bien que demander des réparations pour ces crimes, ou accepter que des organisations ou des Etats en demandent, les forceraient à questionner les structures du système dominant, ce qui dans le système capitaliste libéral blanc est impossible. C’est bien pour cela qu’il y a un consensus visant à laisser hors de la sphère politique le processus de réparations. 

On peut d’ailleurs aller plus loin dans la réflexion sur cet ordre mondial qui revendique la loi et l’ordre pour se maintenir au pouvoir; le même type de consensus existe en ce qui concerne le racisme structurel et systémique qui préempté par un positionnement antiraciste moral et empathique alors que tout le monde, pour peu que l’on soit honnête, admet que pour éradiquer ce type de racisme, il faut changer le paradigme de domination mis en place lors des découvertes

Revenons à la question des réparations. Dans le rapport demandé par le président de la république française Restituer le patrimoine africain : vers une éthique relationnelle[3]les rédacteursidentifient au moins une bonne raison de porter cette problématique « ce ne sont pas seulement des objets qui ont été pris, mais des réserves d’énergies, des ressources créatives, des gisements de potentiels, des forces d’engendrement de figures et de formes alternatives du réel, des puissances de germination ; et (que) cette perte est incommensurable parce qu’elle entraîne un type de rapport et un mode de participation au monde irrémédiablement obérés ». 

En mettant en esclavage, en déshumanisant, en violentant des millions d’Africains, les Européens ont effectivement brisé des « réserves d’énergies, des ressources créatives (…), des puissances de germination» du continent africain.

il ne s’agit pas seulement de réparer les crimes (vol, viol, pillage, meurtre etc..) , il s’agit aussi de réparer le crime colonial fait à l’humain et par conséquent à l’humanité. Depuis cette époque, l’humanité a basculé dans des politiques mortifères qui se retrouvent aussi bien au niveau géopolitique, dans l’expression de l’impérialisme que dans la vie quotidienne des racisés. Il faut bien en prendre conscience. 

Même après les abolitions, cette relation à l’autre n’a jamais cessé d’être traversée par l’indignité portée par les tenants de l’idéologie de la suprématie blanche. 

Les Blancs ont perdu, en esclavagisant les Noirs de l’Afrique et en tuant les indigènes, le sens de l’autre, l’Amour de l’autre, ce n’est pas pour rien que Frantz Fanon appelle de ses voeux « (Qu’il me soit permis de) à découvrir et de vouloir l’homme, où qu’il se trouve. (…)  […] Supériorité ? Infériorité ? Pourquoi tout simplement ne pas essayer de toucher l’autre, de sentir l’autre, de me révéler l’autre ? […] [4]» 

Tant que notre humanité refusera de passer par ce processus, elle sera orpheline d’elle-même, tentera vainement d’inventer de nouveaux droits alors que le besoin essentiel est d’en finir avec le racisme biologique qui a impacté la structure profonde des Etats anciennement esclavagistes et colonisateurs. Le racisme structurel fonctionne comme un système parce qu’il est porté par le capital et la financiarisation du monde,

Cette étape des réparations est humainement un passage obligé si l’on veut aborder la question de l’humain -humain et non ennemi- où il n’y a plus aucune raison de penser l’autre en termes de hiérarchisation et si l’on veut que les relations internationales ne soient plus hégémoniques mais respectueuses d’un droit international qui ne soit ni déstructuré ni délégitimé par ceux qui se considèrent maîtres du monde. 

On voit bien, dès lors, que les réparations sont un processus politique qui force à analyser les éléments fondateurs du capitalisme et de la mondialisation et de leurs conséquences  sur les personnes racialisées. Si ces étapes sont disqualifiées, comme il y a une forte tendance à le faire, il y a fort à parier que ni l’éducation, ni les dates anniversaire ni les balades décoloniales ne suffiront à délégitimer politiquement le racisme structurel.

L’idéologie basée sur le racisme structurel continuera à irriguer les rapports sociaux, culturels, économiques, militaires, et environnementaux. On doit bien appréhender que l’on est passé du Code noir à celui de l’Indigénat puis aux accords de commerce iniques ou des accords militaires qui permettent à des puissances étrangères d’occuper des terres pour y établir leurs bases militaires sans que cela soit remis en cause, sauf par ceux qui en sont victimes.

La « clôture » de la séquence de la mise en esclavage, parce que les profits attendus ne fournissaient plus ce que les Etats et les esclavagistes espéraient, a ouvert les portes à la colonisation, suite logique d’un même système. Ce système perdure et particulièrement en ce qui concerne les corps noirs invisibilisés et silencés afin d’obérer toute possibilité de revendication pour leur droit à la dignité mais aussi par l’occupation rampante de l’Afrique.

Pour conclure, si l’on veut mettre fin au racisme structurel et systémique ainsi que le prétendent de nombreux gouvernants ou de responsables d’institutions internationales, il va sérieusement falloir qu’ils acceptent d’interroger les structures de la mondialisation et du capitalisme à la lumière de la race et de la classe surtout qu’à la suite de la crise financière de 2008, on comprend que le capitalisme n’est pas victime d’une crise momentanée mais d’une contradiction interne qui le conduit à son effondrement inexorable. 

Ne peut on légitimement se demander si cette contradiction ne repose pas sur la volonté de laisser dans la zone de Non Êtres des millions de personnes et particulièrement depuis que ceux qui occupent les fonctions de domination ont voulu prouver par la violence et la barbarie qu’ils étaient les seuls à devoir bénéficier des profits tirés du capital ? 

Dans ce contexte, ne peut on aussi s’interroger sur le rôle joué par certains anticapitalistes ou certains altermondialistes qui n’ont jamais interrogé le rôle du capitalisme et de la mondialisation dans la pérennisation du racisme structurel, donc de l’impact du racisme structurel dans le maintien du capitalisme ? On ne pourra construire d’alternative au capitalisme sans s’attaquer aux sources du racisme structurel.

Les revendications des corps noirs à la dignité et à la vie peuvent-elles être suffisantes pour engager les Ethno class Men à se séparer de l’idéologie capitaliste qui ne cessent de maintenir les Non Êtres du côté de la mort ? 

Une question en suspens à laquelle il ne pourra être répondu que si les Africains et les Afro descendants acceptent de s’unir dans une approche décoloniale panafricaniste pour porter la question des réparations politiques et de poser à plat celle d’une humanité humaine où l’universel aura été revisité non à l’aune de la pensée libérale dominante mais à celle de la dignité dans une perspective proprement décoloniale. 

Mais de plus en plus, il semble bien que cet objectif ne pourra être atteint que si l’Afrique continent est libéré du joug colonial qui n’a jamais cessé de l’étrangler dans ses tentacules meurtrières et prédatrices.

Il faudra aussi interroger des espaces comme celui  des Nations Unies, où la colonialité du pouvoir et de l’Être s’exprime à tous les niveaux, aussi bien entre à les fonctionnaires onusiens que des membres de la communauté internationale. 

A ce titre, l’épisode de la pandémie est exemplaire ; dans ce contexte, les mesures de coercition émanant, la plupart du temps, d’un État fort punissant un État faible et frappant les plus vulnérables des peuples n’ont pas été remises en cause. Ni l’embargo, ni les sanctions économiques, ni le blocus n’ont été abandonnées ou à tout le moins ont fait l’objet d’un moratoire. Ces mesures de rétorsion sont l’expression d’un rapport de force en faveur de l’État dominant qui viole l’obligation internationale des États en contredisant la légalité internationale, de facto, l’embargo n’est pas conforme à la Charte des Nations unies. 

Soulignons que les États imposant ou laissant imposer l’embargo ou le blocus faillissent à leur obligation de protection des droits fondamentaux, Au vu de l’importance des droits en cause, tous les États, absolument tous les États, devraient affirmer qu’ils ont un intérêt juridique à ce que ces droits soient protégés ; les obligations dont il s’agit étant des obligations erga omnes.  

Dès lors, face à l’exclusion juridiquement organisée, face à un ordre de misère, face aux politiques de déstructuration du droit des peuples et des droits humains, il est impératif de refonder un ordre international[5], non basé sur la raison de la force et des intérêts privés mais sur la coopération internationale, le multilatéralisme -mais est ce une forme décoloniale ?- 

En conclusion, si nous prétendons porter les valeurs de l’antiracisme politique, alors il est impératif d’admettre que la colonialité s’exprimant dans les différentes formes de négrophobie d’une part, relève du racisme structurel et d’autre part, est l’expression la plus violente, la plus centrale et la plus évidente de la déshumanisation. 

Si la fin de l’ordre racial mondial implique la libération du Sud, la libération de l’Afrique est la condition de la libération du Peuple Noir, qui sera celle de l’Humanité entière.

Mireille Fanon Mendès France


[1] Article 44 ; Code noir ; mars 1685 ;  http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/esclavage/code-noir.pdf

[2] https://fondation-frantzfanon.com/en-libye-nos-freres-vendus-aux-encheres/

[3] https://bj.ambafrance.org/Telecharger-l-integralite-du-Rapport-Sarr-Savoy-sur-la-restitution-du

[4] Peau noire, masques blancs, Le Seuil Editions ; 1952

[5] Résolutions de la Commission des droits de l’homme sur les Effets des politiques d’ajustement économique consécutives à la dette extérieure sur la jouissance effective des droits de l’homme, en particulier pourl’application de la Déclaration sur le Droit au développement, 1998/24, par. 3 ;  Effets des politiques d’ajustement économique consécutives à la dette extérieure sur la jouissance effective des droits de l’homme, en particulier pour l’application de la Déclaration sur le Droit au développement 1999/22, par. 3 et ;  Effets des politiques d’ajustement économique consécutives à la dette extérieure sur la jouissance effective des droits de l’homme, en particulier pour l’application de la Déclaration sur le Droit au développement, 2002/29, par. 7.


Geopolitic, coloniality, liberation Seminar

Thank you for inviting me to this Geopolitics, Coloniality and Liberation seminar. I speak on behalf of the Frantz Fanon Foundation.

We are living today in a world where the international order has been shaped by 500 years of Western white hegemony. This economic, political and civilizational hegemony was formed over genocide, conquest, the transatlantic slave trade and enslavement.

It has been maintained through colonialism and imperialism, speaking both against the peoples and against the populations from north to south. The violent process of subjugation of non-European populations has been accompanied by the development of a set of justifying discourses which will naturalize domination through racialization.

The white race and its supremacy will be invented during the constitution of this international order set up by Europe and then by the West in which we still live. The invention of races considered inferior, civilizable and colonizable is developing in this same movement, because the Eurocentric world system, which will give birth to the contemporary globalized capitalist order, is based on a true racial division of labor on a global scale.

From 1492, when sailors and soldiers arrived in hitherto unknown lands, peoples speaking out against the plundering of their natural resources were slaughtered. Defeated by the arms and junk that were offered to them, they left – and sometimes had no other choice – to set up counters with the support of banks among which we can cite JP Morgan Chase, Credit Switzerland and the Bank of France …

The foundations of globalization were laid, the free movement of goods was carried on the baptismal font of capitalism, that of people being regulated by white supremacy: Africans torn from their tribe

at the bottom of the holds -status still reserved for them when they want to migrate for reasons of war or economic-environmental reasons- and Europeans-colonizers on the bridge; they could go wherever they wanted and this possibility is always open to them …

Natural resources generated interest and desire because they enriched those who brought them back and they continue to be the issue of power relations, which keeps most of the African peoples, with the approval of their president, in submission to the imperialist forces who need African natural resources. No way they will escape them, just like there was no question that they miss a  free workforce  over which they had the right of life and death.

As early as the 15th century, a century that must be identified as that of a great catastrophe -more precisely metaphysical and demographic (Maldonado Torres, Ten thesis on decoloniality, 2016)-, the colonizers-murderers put in place the enslavement, thus authorizing the use of human beings only for their disembodied labor power so that the difference between labor power and labor is annihilated so that the surplus value generates the maximum profit for the colonizers. The capitalist system thus planted its first predatory seeds.

The advancement of modern conquest and colonialism involved not only the creation of a geopolitical divide based on metaphysical catastrophe, but also the imposition of ideas, organization and social structures.

In this context, the plurality of conceptions of the community and human difference is annihilated, even if in many cases the success is only partial. Despite this, a global community with similar priorities, perceptions, and desires has emerged, what Sylvia Wynter identifies as the Ethnoclass Man (Wynter 2003).

If the ethno class man ruled the body from the 15th century on, to ensure its economic power, it has never ceased to do so.

One only has to look at the large number of young black or Arab incarcerated to understand that these exponential figures demonstrate that this is the price that the ‘indigenous’ bodies pay to ensure the ethno-class Men safety, well-being but especially  freedom.

After having guaranteed the enrichment of white people – period of enslavement – and the domination of white supremacy in the cultural, economic, political, legal fields – particularly with regard to human rights -, one must now ensure their security to ensure their free circulation. The dominance paradigm hasn’t changed one iota. It is colonial, deeply violent, racist, racializing, dehumanizing and inhuman.

Capitalism has always assured those who possess the functions of domination (Robert Kurz) that they can exercise their control over minds and bodies without having to answer for their crimes, and particularly with regard to the treatment they subjected to black and indigenous bodies. Thus bearing on the baptismal font structural racism, one of the colonial expressions of which is the coloniality of Beings over Non-Beings.

So racist European political and cultural models will invade the rest of the world, the countries of the global South will be established as reservoirs of raw materials and Non Being treated as commodities, more precisely as « movable property », as stipulated in the Black Code.

When we speak of enslavement, we speak of dehumanization, denial of the right to life, loss of identity in the name of supposed white superiority. We are talking about a body that no longer belongs to the one who inhabits it and lives it. Even after the abolitions, this relationship to the other has never ceased to be crossed by the indignity carried by the supporters of the ideology based on structural racism.

Let’s stop being naïve and understand that the capitalist system we live in was born out of the division of humanity imposed by the ideology of race as a social marker. In Libya, when migrants are sold like our ancestors were, it moves for a time, but no one makes sure it does not happen again. A few declarations, and always the international institutions and the international community silent … When Afro-colombian human rights defenders are killed in Colombia – more than 200 since the beginning of 2020 -, the Colombian government takes no action against these acts of genocide, while the peace agreements were signed.

As if those who think of capitalism still do not see the perverse and deadly link between black and enslaved, between black and race, between black and class, between race and class.

From this point of view, contemporary social racial inequalities found in all societies of the world are inextricably linked to an international geopolitical order. The black condition is immediately linked to the position of Africa in the order of international trade, just as the Muslim condition in the West is directly determined by the relationship that Western imperialism has with the countries of the Muslim world. Here it is over there. They are bombing there, they discriminate here. They kill here and there.

Race and racial domination are geopolitical by nature, and the fight against racializing racism is a fight which, far from being reduced to moral postures, is a mobilization for the change of paradigm of the international order which gave birth to this system of racialism, exploitation and dehumanization.

Social relations structured by race are a reflection of international relations, and their change depends on a change in these international relations. Racializing racism and imperialism are intimately linked. Western imperialism is one of the most obvious sides of the defense of white supremacy and the economic and geopolitical order that underlies it. Any power that comes to challenge this supremacy is exposed to a violent response, and to a cultural, political, economic, military and even environmental assault.

Each political process aimed at a structural change in this situation of domination is fiercely opposed, like the past and present anti-colonial struggles, and demands for real reparations for the crime against humanity that constituted the enslavement of Black people.

It is clear that at present, no multilateral institution addresses the issue of reparations for crimes against humanity and genocide committed during the transatlantic slave trade, enslavement, colonization and colonialism. States know full well that seeking reparations for these crimes, or accepting that organizations or states seek them, would force them to question the structures of the dominant system, which in the white liberal capitalist system is impossible. That’s why there is a consensus to keep the reparations process out of the political arena.

We can also go further in the reflection on this world order which claims law and order to maintain power; the same type of consensus exists with regard to structural and systemic racism which is preempted by a moral and empathic anti-racist positioning while everyone, as long as we are honest, admits that to eradicate this type of racism, we must change the paradigm of domination set up during the discoveries.

Let us return to the question of reparations. In the report requested by the President of the French Republic Restoring African Heritage: Towards a Relational Ethics, the editors identify at least one good reason for addressing this issue “it is not only objects that have been taken, but ‘energies, creative resources, deposits of potential, forces of generation of figures and alternative forms of reality, powers of germination; and (that) this loss is immeasurable because it results in an irremediably burdened type of relationship and mode of participation in the world ”.

By enslaving, dehumanizing, and violating millions of Africans, Europeans have effectively shattered “reserves of energy, creative resources (…), powers of germination” of the African continent.

it is not only a question of repairing the crimes (theft, rape, looting, murder etc.), it is also a question of repairing the colonial crime done to Human and consequently to Humanity. Since that time, humanity has tipped over into deadly policies that are found at the geopolitical level, in the expression of imperialism, and in the daily life of the racialized. We must be aware of this.

Even after the abolitions, this relationship to the other has never ceased to be crossed by the indignity carried by the supporters of the ideology of white supremacy. The whites have lost, by enslaving the blacks of Africa and by killing the natives, the meaning of the other, the Love of the other, it is not for nothing that Frantz Fanon calls for wishes “(May I be allowed to) discover and want man, wherever he is. (…) […] Superiority? Inferiority? Why not just try to touch the other, to feel the other, to reveal the other to me? […] « 

As long as our humanity refuses to go through this process, it will be an orphan of itself, will try in vain to invent new rights when the essential need is to put an end to the biological racism which has impacted the deep structure of States. formerly slavers and colonizers. Structural racism works like a system because it is carried by capital and the financialization of the world.

This stage of reparations is humanly a necessary step if we want to tackle the question of the human – human and not enemy – where there is no longer any reason to think of the other in terms of hierarchy and if we wants international relations to no longer be hegemonic but respectful of international law which is neither destructured nor delegitimized by those who consider themselves masters of the world.

It is clear, therefore, that reparations are a political process which forces us to analyze the founding elements of capitalism and globalization and their consequences on racialized people. If these steps are disqualified, as there is a strong tendency to do so, it’s a safe bet that neither education, anniversary dates nor decolonial walks will be enough to politically delegitimize structural racism.

The ideology based on structural racism will continue to irrigate social, cultural, economic, military, and environmental relationships. We must understand that we have gone from the Black Code to that of the Indigenate then to iniquitous trade agreements or military agreements that allow foreign powers to occupy land to establish their military bases there without this being challenged, except by those who are victims.

The « closure » of the enslavement sequence, because the expected profits no longer provided what the states and the slavers hoped for, opened the doors to colonization, a logical continuation of the same system. This system persists and particularly with regard to the invisible and silent black bodies in order to obstruct any possibility of claiming for their right to dignity but also by the rampant occupation of Africa.

To conclude, if we want to put an end to structural and systemic racism as claimed by many rulers or heads of international institutions, they will seriously have to agree to question the structures of globalization and capitalism, in the light of race and class especially that following the financial crisis of 2008 ;  we understand that capitalism is not the victim of a momentary crisis but of an internal contradiction which leads it to its inexorable collapse.

We can legitimately wonder if this contradiction is not based on the desire to leave millions of people in the zone of Non-Beings and the refusal to question the foundations of capitalism.

In this context, one can also wonder about the role played by certain anti-capitalists or certain alter-globalizationists who have never questioned the role of capitalism and globalization in the perpetuation of structural racism, and therefore of the impact of structural racism. in maintaining capitalism? We cannot build an alternative to capitalism without addressing the sources of structural racism.

Can the demands of the black bodies to dignity and life be sufficient to encourage the Being to leave the capitalist ideology which continues to keep Non Being on the side of death?

An unanswered question which can only be answered if Africans and Afro descendants agree to unite in a pan-Africanist decolonial approach to raise the question of political reparations and to lay flat that of a human humanity where the universal will have been revisited not in the light of dominant liberal thought but in that of dignity from a properly decolonial perspective.

But more and more, it seems that this goal can only be achieved if the African continent is freed from the colonial yoke that has never ceased to strangle it in its murderous and predatory tentacles.

It will also be necessary to question spaces like that of the United Nations, where the coloniality of power and Being is expressed at all levels, both among UN officials and members of the international community.

The actual episode of the pandemic is exemplary; in this context, the coercive measures emanating, most of the time, from a strong state punishing a weak state and hitting the most vulnerable of peoples have not been called into question. Neither the embargo, nor the economic sanctions, nor the blockade have been abandoned or at least been subject to a moratorium. These retaliatory measures are the expression of a balance of power in favor of the dominant State which violates the international obligation of States by contradicting international legality, de facto, the embargo does not comply with the missions of the UN Charter.

It should be noted that States imposing or allowing the embargo or blockade are failing in their obligation to protect fundamental rights. Given the importance of the rights in question, all States, absolutely all States, should affirm that they have a legal interest in these rights being protected; the obligations in question being erga omnes obligations.

It cannot be ignored that the United Nations has resigned from its obligation to ensure international peace and security, mainly because it has contributed to the violation of the peremptory norms of international law and, above all because it plays the role of a drive belt

of a project and a political, ideological and economic model which aims at the establishment of an international order based on racialization, force, violence and subjugation of peoples, even if its Ethno class men affirm the contrary.

Therefore, in the face of legally organized exclusion, in the face of an order of misery, in the face of policies for the destruction of peoples’ rights and human rights, it is imperative to rebuild an international order, not based on the reason of force and private interests but on international cooperation, multilateralism – but is this the best decolonial way? –

In conclusion, if we claim to carry the values of political anti-racism, then it is imperative to admit that coloniality expressed in the different forms of negrophobia is structural racism and is the most violent, the most central expression. and the most obvious of dehumanization. If the end of the racial world order involves the liberation of the South, the liberation of Africa is the condition for the liberation of the Black People, which will be that of all Humanity.

Mireille Fanon Mendes France